top of page
  • Laheedjah Tikidanke

Dahmer. Définition du mot "Suffoquer".



La dernière fois que j’ai eu besoin d’un aussi sérieux recul après une série, c’était pour « When They See Us » (Dans leur Regard), au sujet du traitement judiciaire putassier infligé à cinq jeunes afros, injustement accusés d’une agression à Central Park en 1989.


Ryan Murphy vient de s’en charger une nouvelle fois sur mon mental avec pertes et fracas.


C’est en 2006, au cours d’un épisode de South Park, que j’ai appris l’existence du fou furieux Jeffrey Dahmer, tueur en série des 90’s dont les lunettes protubérantes barraient un visage aussi inexpressif qu'il laissait s'échapper une voix paisible.


« Monstre – L’histoire de Jeffrey Dahmer », détourne à plus d’un titre, dans le sens où la série ne se limite pas à la genèse et la chronologie des crimes d’un psychopathe solitaire (qui d’ailleurs ne sont que suggérés), mais dissèque la quintessence du privilège blanc et donc l’impunité folle dont a pu bénéficier le personnage qui, trois années durant, a décimé au sein d’une communauté et d’un quartier volontairement ignorés des forces de l’ordre.


Apparaissant presque comme le sélectionneur naturel de la toute puissance des autorités racistes et homophobes, Dahmer a été LIBRE de tuer et, pire encore, autorisé à finir le travail par une police scandaleusement complaisante, temporairement sanctionnée pour ses manquements avant de reprendre du service après l’abattage médiatique, sous l’ovation de sa propre hiérarchie.


Si « Monstre » reste pudique dans la démonstration, elle inflige totalement dans la suggestion et de par la lourdeur absolue de son atmosphère, laissant au spectateur le choix d’imaginer le pire plutôt que d’y assister, œuvrant ainsi à la destruction dans l’œuf de tout espoir d’entrevoir le moindre faisceau de lumière salvateur dans l’obscurité de l’esprit de Dahmer, qui s’étale sur l’écran comme un sac plastique étiré jusqu’au néant sur nos voies respiratoires.


Pas seulement centré sur l’évolution du personnage, « Monstre » se tourne aussi vers l’idolâtrie des détraqués fans de l'assassin, tout comme le voyeurisme du genre humain shooté au morbide qui sommeille en tout un chacun.


Mais surtout, et - important de le noter - avec respect, Murphy rend justice aux victimes et le combat de leurs familles, face au mépris dédié de la justice avant, pendant, et après les crimes de leurs proches, dans l’enfer d’un deuil encore à ce jour perturbé par la voracité d’un public avide de sensations funestes, et qui donc ne finira jamais.


Dramatisation savante d’un fait réel, « Monstre » doit bien les trois quarts de son pouvoir anxiogène au jeu aussi habité que strictement hallucinant d’Evan Peters (talent récurrent de la saga American Horror Story de Murphy) qui, par ses seules expressions faciales et sans jamais un mot plus haut que l’autre, parvient à ressusciter la terreur, jusqu’à sérieusement interroger le spectateur sur la stabilité psychologique de l’acteur, après qu'il ait pu incarner un tel… personnage.


« Monstre », ou quand l’Amérique hypocrite et son humanisme à géométrie variable se regardent dans les yeux.


Un seul mot : THÉRAPIE.


A l'affiche
Posts récents
Archives
SUIVEZ-MOI
  • Facebook Basic Square
bottom of page