- Laheedjah Tikidanke
Precious... ou pas.

Precious... ou quand Miss Célie et Cosette réunies font "splash" dans le même marécage boueux du 3ème millénaire.
Si d'aucuns considèrent ce film comme un chef-d'oeuvre du genre (se référer aux standing ovations reçues au Festival de Cannes), je l'aurai personnellement pris comme une série de points de suspension en guise de réponse sadique à mes interrogations, perpétuelles durant une projection qui m'aura parue aussi pénible qu'interminable.
Je cherche encore la réelle motivation de Lee Daniels, Oprah Winfrey et ses potes à avoir cautionné un tel étalage de misérabilisme d'égoût et une mise à nu aussi racoleuse de la souffrance humaine, sous prétexte de vouloir dénoncer l'exclusion avec pour point de mire une famille monoparentale désœuvrée afro-américaine.
Portés par l'engouement suscité à sa sortie, on a au début envie de croire et suivre l'histoire de Precious, à qui la vie et ses épreuves n'ont définitivement rien épargné, mais passer les trois quarts du temps à écarquiller les yeux et frôler l'évanouissement devant le choc profond des péripéties décrites tout au long du film amène tôt ou tard tout spectateur sachant mettre son émoi de côté à se demander "à quand la fin du racolage" ? car c'en devient. Du racolage. Et c'est insupportable, démesurément caricatural, à tel point que l'intention première en devient finalement suspecte.
Quiconque ne connaissant pas le fonctionnement d'une famille monoparentale issue de la communauté Afro et tombe sur ce film s'en fera une image des plus cliniquement confortables et aberrantes qui soit, car absolument tous les clichés et préjugés y passent, y stationnent, y font leur nid et finissent par gangréner tout le reste. Et "Precious" travaille ardemment à nourrir une réputation dont les Afros (qui aux US n'ont pas tous plébiscité ce film) n'auront définitivement pas besoin.
Ici, Precious n'a de précieux que le nom. Precious est l'archétype de celle qu'on ne remarque pas, qu'on ne considère pas, et qu'on ne déteste même pas tant on oublie qu'elle existe.
Mais le profil est encore trop doux. Precious est aussi obèse, mère des enfants de son défunt violeur et séropositif de père, insultée et battue par sa pseudo rivale et suceuse d'alloc de mère qui, à défaut de l'allaiter à la naissance, a préféré donner le sein à son pédo de mari, quand ce n'était pas pour la lui donner en offrande sexuelle dès l'âge de 3 ans pour éviter de le perdre. Mais elle le perd quand même et Precious paye non seulement d'avoir été sexuellement plus visitée qu'elle, mais aussi d'avoir fait d'elle une "mal-baisée" réduite à l'élever seule, elle et ses deux gosses dont l'une, trisomique, est officiellement baptisée "MONGO", pour "Mongolienne".
Ajoutons à ça l'aversion qu'a Precious pour sa propre couleur de peau et qui, le matin devant sa glace, se rêve mince, blanche, blonde, et petite amie d'un "homme à la peau claire".
... A lui seul, ce détail de trop qui vient s'ajouter à une ribambelle d'autres déjà suffisamment vomitifs au demeurant, suffit à totalement me dessouder d'une pareille mascarade aux faux-airs souterrains d'une Couleur Pourpre qui se voudrait urbaine (et d'ailleurs indirectement citée dans le film), mais qui, à côté de l'originale, fait surtout office d'un portrait vitreux du misérabilisme aux relents particulièrement marqués.
En son temps, Halle Berry était oscarisée pour "A l'Ombre de la Haine", dans lequel elle se faisait tirer par le raciste assassin de son mari. Aujourd'hui Mo'Nique connaît la consécration pour son rôle de mégère négrophobe, dépigmentée du visage et complice d'inceste sur sa propre fille.
De ces deux films ressort un nom commun. Lee Daniels. No Comment.
Exit les emballements et autres recommandations habituels sur les jeux d'acteurs et autres prestations sur ce film. Allons-y franchement j'en n'ai strictement plus rien à battre.