- Laheedjah Tikidanke
Inglourious Basterds ou la Résistance sauce Tarantino

... Tarantino ou l'art du coïtus interruptus chronique.
Mater un Tarantino revient à se faire allumer pendant deux plombes en ayant une fois sur cinq l'occasion de se faire pénétrer mais rater son orgasme à deux doigts du déchiquetage de rideaux. On croit qu'on le touche, mais à la dernière fraction de seconde, on rate son tir. Alors on rempile jusqu'à épuisement du fond de brique de jus et on conclut ivre mort par un poli "c'était pas mal" pour ne pas avoir à dire à l'autre qu'on est déçu.
Le paradoxe est qu'on y retourne car on aime se faire du mal, sachant qu'il est arrivé parfois dans le passé qu'on ait atteint le but recherché, soit prendre son pied.
Tarantino, on l'aime ou pas, on l'ignore ou pas, mais tout un chacun s'accordera à lui reconnaitre cet amour du cinéma à travers lequel il peut absolument tout se permettre (bande-son "Blaxploitation" fusion Western pour un film de guerre dans lequel Hitler se fait dégommer par un squad sanguinaire d'insurgés Résistants Juifs), et ceci d'abord pour son plaisir personnel. Tarantino ne fait pas de cinéma pour l'argent et le box-office, mais pour l'amour du 7ème art tout court et de lui-même. Et chez QT, 7ème art et égo ne font qu'un.
Une caméra dans les mains et QT est dans son aire de jeux de naissance. Les acteurs seront ses jouets, les femmes sa source d'inspiration, le Vintage sa mission, l'humour déjanto-cradingue sa prédilection, et l'utra violence son pêché mignon. On secoue le tout et on obtient du Tarantino pur jus acide et tout en contradictions, qui passionne autant qu'agace et enthousiasme autant que déçoit.
Une sauce aigre-douce dont Inglourious Basterds se révèle être une parfaite illustration de l'univers du cinéaste, où l'humour autant que l'agacement font qu'on en ressort l'engouement en demie-teinte, la faute sans doute - et récurrent chez QT - à la tortueuse longueur des dialogues, chers à Tarantino qui prend un plaisir malsain à faire jacter inutilement ses personnages dans des conversations à la banalité des plus cliniques.
On se marre très violemment un coup, on suffoque sur la violence aussi crue qu'explicite la minute qui suit et on s'ennuie les vingt minutes d'après, tout ceci en boucle... et c'est bien dommage.
Rien à reprocher pourtant à la distribution ou la qualité du jeu des acteurs, en dehors peut-être d'un Brad Pitt un peu caricatural en chef de bande à l'accent sudiste et au rictus à long terme abusif, ou d'un certain désintérêt pour le rôle tenu par Mélanie Laurent, qu'on ne peut s'empêcher de comparer - même un peu - à l'inoubliable Béatrice Kiddo du cultissime "Kill Bill", mais en 20 fois moins pertinente. Car il s'agit encore ici de la vengeance d'une femme, rejointe ici par celle des Inglorious Basterds eux-mêmes par le pur fruit du hasard.
Un peu déçue aussi par cette troupe de casse-cous vengeurs, prodigieusement entrée en scène mais peu vue à l'œuvre et vite décimée, en conséquence de quoi l'intérêt pour le reste du film devient rapidement moindre.
On dira qu'Inglorious Basterds a su toucher tous les registres, mais que le dosage, sur 2 h 30 de projection, a plus été hasardeux qu'astucieux.
Donc, sympa dans l'ensemble mais quand même sacrément bof sur les bords...